IMAPEC
Pierre volcanique
Nous voici à Volvic, dans les locaux d’IMAPEC (Institut des Métiers d’Arts de la Pierre et de la Construction). Cette école, qui portait à sa création le nom « l’école d’architecture » fut créée en 1820 par le comte de Chabrol de Volvic. Ici, on forme des sculpteurs, des graveurs et des tailleurs de pierre, puis des émailleurs sur lave.
C’est dans ce lieu chargé d’histoire que nous partons à la rencontre de Laurence Castanié, formatrice et artisane d’art en émaillage sur lave depuis 36 ans. Elle nous reçoit dans l’atelier où sont formés les élèves, de nombreuses créations ornent les étagères.
Sa présence dans cette pièce est frappante, l’histoire de ces lieux émane d’elle. Laurence s’installe à la table des élèves, boit un café, puis explique son parcours et sa passion. Son père était tailleur de pierre, meilleur ouvrier de France, lui-même fils et petit-fils d’une lignée de tailleur de pierre, tous nés dans la cité de la pierre : Volvic. Tout s’explique !
Les différentes rencontres qu’elle fera autour de ce matériau la conduiront à se former dans cette école. Elle deviendra artisane, puis transmettra à son tour son savoir-faire dans cet établissement emblématique. Laurence trouve ainsi sa place dans cette histoire familiale et ouvre un nouveau chapitre avec sa personnalité, sa sensibilité artistique, son inépuisable créativité et son profond désir de transmettre pour que ce savoir-faire perdure.
Rencontre avec une artiste au service de son art, passionnée, généreuse, sincère, qui a le don de mettre en lumière tout le potentiel qu’offre la lave émaillée. Et tout ça avec une grande humilité.
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Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel ?
Il y a 40 ans, Volvic était animé par les tailleurs de pierre. J’ai grandi au rythme des sons des outils qui sculptaient la pierre et qui résonnaient dans les rues de Volvic. J’allais voir mon père qui travaillait dans son atelier, j’avais une curiosité pour cette matière. Puis, j’ai découvert l’atelier Amblard qui faisait de la lave émaillée. J’ai des images très précises de ce lieu, de ce four, du feu, de ce qu’on m’expliquait, du toucher de l’email. C’est toujours resté imprégné en moi. Mais la révélation pour le métier d’émailleur sur lave s’est faite plus tard quand j’ai fait la connaissance de Didier Sandrin, directeur de l’école d’architecture de Volvic. Cela a vraiment été une rencontre, il parlait très bien de la pierre et de la lave émaillée. Il avait des idées novatrices, c’était un homme de goût, très classe, il m’a convaincu. J’avais 19 ans. J’ai alors décidé de m’inscrire dans cette école. J’ai été formé par Joël Barbiéro, un peintre reconnu que je considère beaucoup, il avait sa manière bien particulière d’aborder l’émail. Il m’a dit des choses qui ont fait écho en moi et qui m’ont guidée. Et puis il y eu Jacques Serre, qui est pour moi un maître. C’était un émailleur extraordinaire. J’ai eu de la chance de rencontrer de bons formateurs.
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Pouvez-vous nous parler de votre technique d’émaillage ?
Je ne recouvre jamais totalement la pierre par l’émaillage, elle est toujours présente et mise en valeur. Après, la base de travail, c’est l’engobe et le cloisonné (tracé au crayon de papier). Je réalise des mélanges avec les émaux en poudre pour obtenir la couleur que je souhaite. Je pose mon émail sur la pierre et j’effectue une première cuisson. La couleur s’exprime après la cuisson. J’ai les couleurs en tête, je connais les mélanges, c’est une question d’habitude. Je peux travailler avec des émaux brillants, des émaux mats, des émaux métalliques, je peux aussi obtenir des émaux nacrés. Je travaille au pinceau et je fais également de la sérigraphie. Les possibilités sont infinies, tout est permis.
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Où trouvez –vous vos inspirations ?
Cela peut partir d’un mot, d’une couleur ou d’une forme. Quelque chose qui me touche et qui crée une émotion. Puis je me mets dans ma bulle et je laisse parler ma créativité. Je crée beaucoup la nuit, cela peut durer plusieurs heures. J’associe les mots et la couleur, il y a toujours un sens et un message dans mes créations.
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Vous avez un style particulier ?
J’aime bien le moderne, mes créations sont assez graphiques, j’aime la minutie, je crée des compositions avec des petites séquences. Je cherche une lumière, une précision. Je travaille beaucoup le carré, je ne sais pas pourquoi, c’est peut –être une recherche d’équilibre mais en ce moment j’ai envie de retourner dans la spontanéité. La spontanéité offre une grande liberté, une forme de lâcher- prise. J’apprécie aussi le contraste entre le rustique et le moderne. Cela permet d’avoir deux lisibilités, quand on observe une œuvre de loin, on voit des couleurs qui se marient ensemble et lorsqu’on s’approche, on voit pleins d’autres choses.
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Quels types de commandes avez-vous ?
Je réponds à des commandes spécifiques : de la signalétique, des tables d’orientation, j’ai même travaillé pour de la haute couture en créant des boutons en lave émaillée. J’ai aussi des commandes plus intimes, pour des mariages ou bien des baptêmes. Je discute beaucoup avec mes clients, je prends des notes. Cela nécessite une grande écoute et il faut être réceptif aux émotions car les objets que je crée sont symboliques pour mes clients.
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Depuis quand enseignez-vous à IMAPEC ?
Depuis 2009. Cette école, c’est un conservatoire. J’ai un réel attachement par rapport à l’histoire de ce lieu. Et puis j’aime transmettre, enseigner. Je me rappelle toujours de cette parole de Didier Sandrin qui avait dit : « il faut que ce soit un lieu où on voit des choses différentes de ce qu’on a pu voir en lave émaillée, il faut changer l’image de cette discipline et mettre en valeur toutes les possibilités qu’offre cet art ». Cette phrase m’est toujours restée en tête.
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A quel type de public vous adressez-vous ?
A tout type de public. Certains ont un cursus en art, d’autres sont issus de milieux très différents. J’ai des élèves qui savent exactement ce qu’ils veulent en venant se former ici puis d’autres se cherchent. Certaines personnes ont eu un parcours de vie difficile, ils viennent se réparer. Ils se rendent compte qu’ils sont capables de réaliser une création, cela leur redonne confiance en eux. C’est un art qui a des effets thérapeutiques.
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Quelle est votre plus grande satisfaction dans vos enseignements ?
C’est de transmettre pour que ce savoir-faire perdure. Je n’ai aucun secret. Je trouverai ça dommage de ne pas garder une trace des techniques ou bien des mélanges qui ont permis de réaliser de belles couleurs. Mon travail est d’expliquer toutes les possibilités qui existent dans la lave émaillée afin que chaque personne, en fonction de son histoire, puisse s’en inspirer. Il existe un langage de la pierre, je le dis à mes élèves : parlez-lui à cette pierre, rentrez en contact avec votre lave ! C’est un matériau qui a de la présence, il était là bien avant nous et il reste vivant. Il y a une réceptivité entre la personne et la pierre. Savoir se connecter avec ce matériau nous le fait travailler différemment. Puis, je leur apprends à être rigoureux pour maîtriser toutes les techniques car ils peuvent être amenés à travailler dans le domaine du luxe.
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Comment définiriez-vous votre attachement à la pierre de Volvic ?
J’aime la pierre de Volvic pour sa résistance et pour sa régularité exceptionnelle. Elle supporte des températures très élevées, elle ne se déforme pas quand elle passe dans le four. C’est à ma connaissance la seule pierre qui a cette résistance. Elle est également très résistante au froid. Elle est un support à la créativité et elle séduit beaucoup. La pierre de Volvic reste une pierre artisanale. C’est un matériau qui prend des rôles différents, il est autre et semblable à la fois, Il faut du temps pour l’extraire et le travailler. Son exploitation à grande échelle serait compliquée et c’est peut-être ce qui fait son charme. J’ai beaucoup de respect pour cette pierre. Rendez-vous compte ! Ces volcans qui nous ont fait don de cette matière incroyable ! C’est pourquoi, quand je réalise une pièce, je veux qu’elle soit parfaite.
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Quelle est la plus belle pièce que vous ayez réalisée ?
C’est une sculpture que j’avais créée pour la remise du prix pour le réalisateur Dominik Moll, qui a réalisé le film « Harry un ami qui vous veut du bien ». C’était une spirale où j’avais intégré des cadres comme des séquences de cinéma avec des mots et des représentations qui racontaient le film.
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Quel est votre plus beau souvenir ?
Mes premières cuissons dans mon propre atelier, ça fait partie des moments qu’on oublie jamais mais ce sont surtout des rencontres et des projets, comme par exemple quand j’ai réalisé des assiettes pour le restaurant « le bus 26 », c’était une belle aventure et un super moment. C’est la diversité des rencontres et la découverte de différents univers qui font la richesse de ce métier, ce sont des moments forts !
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Si vous aviez un message à transmettre, quel serait- il ?
Plus on travaille ensemble avec la force de chacun et plus on va créer de beaux projets communs. C’est une approche philosophique du métier qui montre que la créativité s’exprime autour de l’échange et du partage des connaissances. La pierre de Volvic est un matériau qui rassemble les gens.
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Un mot de la fin ?
La lave émaillée est un art universel et intemporel. Venez, rentrez dans des ateliers d’émaillage, vous allez apprendre de grandes choses par rapport à notre région et à notre identité.
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Où trouver ses produits ?
Boutique Reflets d’atelier,
17, rue du commerce, 63200 Riom.